Ne me libérez pas, je m'en charge

Michel Vaujour a passé 27 ans en prison dont 17 en cellule d'isolement en quartier de haute sécurité. Cinq fois évadé, parfois de façon audacieuse (l'hélicoptère dans la prison de la Santé, c'était lui), il n'a jamais apprécié l'enfermement. Lorsqu'il frôle la mort lors d'une arrestation et doit apprendre seul à remarcher, sa vie change progressivement. Petit à petit, le bandit devient, à force d'introspection et de réflexion, un homme apaisé et sans rancoeur qu'invite à découvrir ce portrait.

Le titre et le personnage laissaient craindre le pire : un regard à peine distancié plus intéressé par le monde des malfrats et du banditisme que par le personnage. Il n'en est heureusement rien. Très tôt fascinée par le personnage, Fabienne Godet a su convaincre Michel Vaujour, aujourd'hui libre, de se prêter à cet exercice singulier que celui qui consiste à s'exprimer seul face à une caméra. À peine quelques images éclairent-elles l'histoire du personnage médiatique, le reste n'est qu'une discussion à bâtons rompus entre un homme qui a dépassé l'enfermement et su trouver, dans le manque le plus total, une étonnante sérénité pour redémarrer, à sa sortie, une vie presque vierge. Pour autant, au-delà de l'homme, Fabienne Godet dessine un parcours appuyé sur d'autres, restés le plus souvent hors cadre. Dans les mots et les yeux de Michel Vaujour, apaisé, s'ébauche aussi une ligne de vie propre à toucher chacun. Jamais aucun effet ne vient se mettre entre le récit et le spectateur, au contraire emmené toujours plus près d'un personnage qui se dévoile avec une confondante simplicité. Derrière l'anecdote, Fabienne Godet débusque la leçon de vie, c'est elle qui donne sa force et sa qualité au film. Elle, et l'homme qui la transmet.