Ce spectacle et cette envie, Dominique Sarrazin les avait dans la tête depuis longtemps. Ces jours-ci, à l'invitation du Théâtre du Nord, il crée (Mon) Copperfield au théâtre de l'Idéal de Tourcoing.

 

 

Sortir : Pourquoi avoir choisi de vous intéresser à Charles Dickens dans le cadre de cette création ?

Dominique Sarrazin : C'est un auteur qui m'a profondément marqué dans mon parcours personnel et David Copperfield est en quelque sorte le livre qui m'a mené à tous les autres. Sa lecture m'a beaucoup apporté et je le considère un peu comme le roman de mon enfance. Il remue en moi des choses sur la perte, l'abandon. Mon désir de l'adapter sur scène vient de l'amour que je porte à ce texte et que je souhaitais pouvoir transmettre sur les planches en essayant de rendre perceptibles les plaisirs de l'enfance. Pas simplement d'un point de vue un peu nostalgique mais à travers la perception que j'ai pu en avoir vers la fin des années 60 où les seuls mots d'anglais que je connaissais venaient des pochettes des singles des Stones ou des Animals. Dans cette adaptation, je me permets donc quelques petites transgressions entre les époques pour tenter de rendre vivace cet amour de la lecture et la qualité de ce texte.


Sortir : Le roman est copieux, l'adapter pour le théâtre était-il une épreuve ou le mélange entre vos souvenirs et vos envies s'est-il fait assez naturellement ?

D. Sarrazin : Le travail d'adaptation a été long. Au départ, je pensais pouvoir aller au bout du roman mais j'ai du me résigner à me concentrer sur l'enfance (non sans abandonner l'idée de pouvoir plus tard donner vie à une deuxième partie). Il m'a donc fallu sacrifier plusieurs parties du roman mais j'ai veillé à garder les moments marquants, notamment le rapport de David aux « grands », et aux « puissants » souvent aussi imposants que ridicules. Dans cette histoire, le héros est un spectateur, une sorte de caméra embarquée qui regarde les fous, les sadiques et les barrés de son univers... Je souhaitais aussi ne pas dépasser 2h30 de spectacle. J'ai donc coupé mais comme ce roman m'habite, le travail d'élagage n'a pas été trop difficile.


Sortir : Vous dirigez le théâtre de la Verrière à Lille et la compagnie du théâtre de la Découverte; être invité par Stuart Seide et le théâtre du Nord à créer votre spectacle dans une de ses salles est-il important pour vous ?

D. Sarrazin : Ça l'est effectivement et à plusieurs titres. D'abord parce que cette coproduction est un soutien important et qu'elle me permet de monter un spectacle avec pas moins de seize comédiens sur scène; ce qui est devenu une rareté de nos jours du fait des difficultés que les artistes rencontrent actuellement dans notre pays. Mais c'est aussi, pour moi, un symbole fort de transgression des territoires entre les théâtres qui prouve que, même en ayant un lieu et en travaillant dans la même ville, deux hommes de théâtre aux parcours et aux moyens très différents peuvent collaborer. Stuart Seide suit mon travail depuis son arrivée à Lille et j'ai accueilli sa proposition avec enthousiasme d'autant qu'elle va aussi permettre de marier les publics de nos structures, sans compter que l'aide technique de l'équipe du Théâtre du Nord m'est un précieux soutien.