Vince et Angelino ont décidément du mal à digérer leurs récentes découvertes. Après un périple hors de Dark Meat City, les voilà de retour dans un enfer urbain des plus hétéroclite tandis qu'ailleurs, le monde sombre dans une apocalypse inattendue. Run continue de dérouler son univers éclectique au fil de pages toujours plus soignées, multipliant les angles d'attaques, les découpages travaillés, les choix graphiques tranchés (et variés) et les rebondissements, Mutafukaz continue de tracer son sillon entre un côté urbain et graf très assumé, une narration décomplexée et réjouissante et un design sans pareil. Le récit autant que l'objet constitue un ensemble joliment maîtrisé, de ceux qui donne un ton et une force à un univers riche, aussi brindezingue soit)il parfois (et c'est tant mieux!). Un tome 4 qui, loin de s'installer dans une routine, n'hésite pas dynamiter (au propre comme au figuré) personnages et scénario pour un mélange foutraque mais diablement joyeux et pétri de clins d'oeil bien sentis. Run ose le mélange et sort de son chapeau une apocalypse aux relents aussi bien bibliques que nourris de séries Z croisant invasion extraterrestre et film catastrophe. Loin de l'impasse annoncée par son titre, ce tome éclate les barrières et les frontières laissant le lecteur épuisé, ravi et terriblement curieux du final (à venir) d'une série qui aura laissé des traces.


web Lire Anakama Rouge Coeur Ardent.jpgFlorent Maudoux lui-même l'avait annoncé il y a déjà longtemps, son univers Freaks' Squeele allait connaître une déclinaison. Les fans se réjouissaient déjà et c'est Sourya Sihachakr qui s'est vu confier la mise en images du récit de Rouge. Difficile d'assumer la suite de Florent Maudoux, maître ès graphisme et narration à couches multiples et pourtant, en jouant presque le contrepied du graphisme hyper travaillé, son comparse réussit un joli hold-up. Côté scénario, rien à redire, Maudoux lui-même tenait à donner de l'ampleur à son univers et c'est le personnage de Xiong Mao (dont on croise par ailleurs la mère Massiko dans les DoggyBags du label 619 chez Ankama) qui a les honneurs de cette série dérivée. La jeune Xiong Mao doit donc faire face à sa famille et à ses camarades d'école. Rien à redire sur un récit maîtrisé et qui vient joliment prolonger l'univers, la surprise vient plutôt du dessin de Sourya Sihachakr, d'abord déstabilisant pour qui connaît le trait de Maudoux puis peu à peu envoûtant. Mine de rien, Sihachakr donne à l'album une jolie couleur et un ton bien à lui, donnant à Rouge une belle identité et une jolie cohérence graphique. De simple spin off, la série acquiert du coup une stature bien à elle et laisse son lecteur avec une belle envie de poursuivre cette découverte.


web Livre Ankama The Grocery.jpgDans le sillage d'un premier tome à la mise en place un peu longue mais qui finissait par prendre au corps au fil d'une dépiction sans fard d'une ultraviolence urbaine, le duo Singelin-Ducoudray revient pour narrer la suite des aventures d'Elliott, gamin un peu naïf trimballé au fil d'une guerre des gangs pour le contrôle des quartiers de la ville et du commerce de la drogue. Au fil de dessins dont le trait simple pose un contrepied puissant au récit âpre, réaliste et dur qu'Aurélien Ducoudray rythme de mieux en mieux, ce deuxième tome de The Grocery tient les promesses du premier en densifiant encore son récit. Une suite efficace, entre le pêchu, le décalage et de puissants accents de réalité. Le tout emballé avec le savoir-faire des équipes du label 619 donne un album diablement solide. L'ensemble a beau être une fiction, on ne peut s'empêcher de se dire que les évènements mis en scène par le duo relèvent du possible. C'est en cela que l'efficacité de The Grocery fait mouche : elle parvient presque à faire disparaître la frontière entre le réel et le récit.