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André Comte-Sponville, de la morale avant toute chose !

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Quand un philosophe se mêle d’économie, le discours prend de la hauteur tout en restant clair, ce qui est, depuis toujours, la marque de fabrique d’André Comte-Sponville.

Passionné de politique d’abord et d’économie ensuite, le philosophe nous livre dans cette nouvelle édition mise à jour ce printemps, ses réponses à Marcel Conche, Lucien Sève et Yvon Quiniou qui lui ont fait quelques objections suite à la parution en 2004 de la première édition du « Capitalisme est-il moral ? »

Rien n’est plus salutaire en ces temps de crise économique planétaire que de réfléchir à la place de la morale dans l’économie, aux fondements de la démocratie, à la barbarie technocratique et libérale génératrice de désordres financiers et sociaux dont notre époque n’est pas avare. Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, la morale revient au galop, elle est devenue à la mode et même les politiques parlent de moraliser le capitalisme, mais peut-on moraliser un marché ? Non, bien sûr. S’il y a une moralisation à opérer d’urgence, c’est d’abord la nôtre en tant qu’individu, et puis gardons à l’esprit que la démocratie n’est pas une assurance vie contre toutes les dérives politiques… car nous dit-il « Dans une démocratie, c’est le peuple qui est souverain, ce qui exclut que les marchés le soient ».

André Comte-Sponville nous démontre preuve à l’appui que si le capitalisme n’est pas prêt de disparaître c’est parce que son carburant est l’égoïsme fondamental des hommes, et qu’il est dangereux de transformer les problèmes politiques en problèmes moraux. C’est à la lumière de Pascal et surtout de Marx, qu’André Comte-Sponville relit toujours avec une grande attention - souvenir de ses quelque dix années passées dans sa jeunesse au Parti Communiste - qu’il nous prouve l’amoralité fondamentale du capitalisme. Pour mieux comprendre le capitalisme, il faut donc relire Marx et aussi Comte-Sponville ! La thèse principale de l’ouvrage reste que la morale est l’affaire des êtres humains, pas des systèmes, et que si notre démocratie va mal, c’est plus de politique qu’il nous faut.

 

La jeunesse d’un philosophe…

Hasard des parutions éditoriales, c’est aussi ce printemps qu’est sorti en librairie « Du corps », le premier livre écrit par un jeune Comte-Sponville de 26 ans et encore jamais publié. Et là, surprise ! Tous les axes de réflexion qui ont construit son œuvre sont déjà en germe. On a l’impression que pour devenir le philosophe qu’il est aujourd’hui, il lui a suffi de labourer les sillons qu’il avait commencé à creuser à l’âge où d’autres se demandent encore ce qu’ils vont faire de leur vie. Dans une importante préface d’une cinquantaine de pages, l’auteur jette un regard amusé sur le jeune homme qu’il était quand il affûtait sa pensée et rêvait de « philosopher au premier degré » en revenant aux Grecs. Quant au texte de ses 26 ans, cet antimoderne aujourd'hui assumé, règle déjà son compte à toutes les avant-gardes et affirme avec l’enthousiasme de la jeunesse « Une sagesse pour notre temps, voilà ce que je cherchais ». On n’est pas étonné de voir passer au fil des pages Epicure, Spinoza, Marx, Freud, Lucrèce ou Montaigne, on l’est plus à propos de Mozart, Schubert, Chardin ou Vermeer, et surtout de ses prises de position sur l'art contemporain qui ont le mérite d'être sincères, même si elles peuvent faire grincer quelques dents. Petite précision utile à propos du titre de ce livre qui aurait pu s'appeler De l'âme, nous dit son auteur, puisque selon Spinoza "l'âme et le corps sont une seule et même chose"Ce petit traité du matérialisme quotidien est à mettre entre toutes les mains rien que pour cette belle conclusion : "Laissons Sisyphe à ses rochers imaginaires. Il faut être Icare heureux".

Publié le 01/06/2009 Auteur : Françoise Objois

 André Comte-Sponville : Le capitalisme est-il moral ?, éd. Albin Michel, Du corps,  éd. PUF


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