Sortir Marseille Provence : A 47 ans, vous avez ouvert votre école de tango, après trois petites années de pratique. N'est-ce-pas un peu court pour donner des cours ?

Nacer Ardjoun : Je comprends que cela puisse surprendre. Mais la facilité avec laquelle j'ai progressé dans cette discipline m'a moi-même surpris (ainsi que ses professeurs de danse – NDLR), jusqu'à ce que je comprenne que mon parcours antérieur m'avait quasiment prédestiné à embrasser le tango.


 

Sortir : Est-ce à dire que l'appel du tango vous obsédait depuis déjà longtemps ?

N.A. : C'est vrai que la musique me parle depuis tout petit, depuis l'âge de huit ans en réalité. A l'époque, je suis tombé sur une scène de tango jouée par Rudolph Valentino dans les Cavaliers de l'apocalypse, qui m'a littéralement captivé. Il m'aura fallu 36 ans et une résolution de début d'année pour m'y mettre ! Entre-temps, j'ai pratiqué pas mal de métiers et d'arts martiaux, dont l'aïkido. Enoncé ainsi, ça n'a l'air de rien, sauf que la maîtrise de cette discipline m'a considérablement préparé à l'apprentissage du tango.


 

Sortir : Le tango et l'aïkido n'ont pourtant rien à voir ?

N.A. : Au contraire, ces deux arts n'ont que des points communs : la nécessité de se recentrer constamment, de faire correspondre ses énergies ou de décoder les déplacements. Surtout, ces apprentissages sont les plus difficiles à assimiler. Les ayant intégrés dans le cadre de mon art martial, je me suis donc senti à l'aise dès mes premiers pas de tango. J'ai gagné un temps précieux et pris un plaisir immense sans attendre. C'était un autre signe...


 

Sortir : Et le début d'un passionnant voyage dans l'Europe du tango ?

N.A. : Je suis allé à Paris, histoire de me frotter à des danseurs encore plus chevronnés... plus guindés aussi. N'y trouvant pas mon bonheur, j'ai préféré partir pour Berlin, la seconde ville du tango sur la planète après Buenos Aires. J'y ai vécu des milongas (bal tango – NDLR) sensationnelles, lors desquelles j'ai beaucoup progressé, avant de revenir en Provence, où j'ai créé mon école l'année dernière... en attendant de faire le voyage en Argentine.


 

Sortir : Pourquoi avoir décidé d'enseigner le tango, dans un paysage local déjà plétorique en cours de danse ?

N.A. : C'est vrai que le tango a le vent en poupe. Contrairement à certains « puristes », je ne le déplore pas, bien au contraire ! En ce qui me concerne, j'ai toujours eu cette volonté de transmettre aux autres ce que j'avais en moi, avant même d'enseigner de tango. J'ai d'ailleurs été prof d'économie par le passé (Nacer est titulaire d'un DEA de mathématiques appliquées à l'économie) J'ai même été aux commandes d'une agence de pub, où je prenais plaisir à manager une équipe. Mais c'était une autre époque. Aujourd'hui, je vis par et pour le tango, et je suis pleinement heureux. Ce bonheur aussi, je veux le partager !