On cite Charles Pennequin parmi vos influences...
Pennequin je l'ai cité quelques fois. Etant un lecteur de poésie régulier, quotidien, mes goûts et mon appétit m'ont fait cheminer vers des auteurs contemporains comme Pennequin donc, mais aussi Christophe Tarkos. Ces deux-là m'ont assez bouleversé. Pennequin vous installe dans une sorte de situation volcanique. Sa manière d'utiliser la langue, comment la parole jaillit de lui. C'est une forme de double nerf conscient puisqu'il est conscient de cette prise de parole-là et en même temps, il fait jaillir des sortes d'injonctions formant une langue à la fois enfantine, adulte et parfois d'outre-tombe et finalement je trouve ça simplement très beau.

Pour votre carte blanche aux Correspondances de Manosque en 2011, vous revendiquiez un faible pour Christophe Tarkos, Philippe Jaccottet, Roberto Juarroz, Charles Pennequin, Melville et Lowry...D'où vous vient cette passion pour la littérature et notamment la poésie ?
Je viens d'un milieu populaire, issu d'une famille de pêcheurs et j'ai deux frères qui sont encore pêcheurs. Moi-même, j'aurais pu devenir pêcheur. Etre pêcheur ou cosmonaute n'empêche pas de s'intéresser à la poésie mais d'où je viens, trouver des nourritures spirituelles ou intellectuelles ne faisait pas partie des prérogatives quotidiennes. Le premier livre que j'ai lu, ou fait semblant de lire, c'était sans doute sous la menace d'un proviseur. En ayant lu si tard, j'ai été véritablement allumé par ce monde bis que se révèle être la littérature. Je m'y suis plongé entièrement, par revanche, par extraction sociale, tout simplement

Et comment êtes- vous passé de lecteur à auteur ?
Auteur ? Je ne sais pas si j'en suis véritablement un. De même que j'ignore s'il y a un lien entre le lecteur que je suis et l'autre qui écrit. J'écris des chansons surtout. Des choses assez courtes. On ne peut pas appeler cela vraiment de la poésie, même si cet acoquinement avec la musique apporte une certaine proximité. Mais c'est autre chose la chanson.

Vous n'êtes pas un poète qui se cache derrière la musique ?
Si en fait. Les poètes que j'apprécie particulièrement peuvent être qualifiés de kamikazes par rapport aux canons habituels de la littérature. En chanson, avec l'aide de la musique, le risque est moindre, ce n'est pas un sacerdoce. C'est plus courageux d'être un poète. Un poète ça a moins à voir avec les mots qu'avec une profession de foi, un engagement complet de chaque jour.

Participer à ce type de projet ou comme cette création Cachalot pour Arte Radio, ce sont des choses qui font partie de vos bouffées d'oxygène ?
Dès lors que les projets participent à un lien plus ou moins direct avec la musique, avec la parole ou autour de ce que l'on pourrait appeler la poésie, j'ai plaisir à aller dans ces périphéries-là

Musique, littérature, création radiophonique...envie de toucher à d'autres formes d'art ?
Ecrire et faire de la musique me satisfont pleinement. J'ai un autre projet qui se concrétise dans le registre du théâtre, mais qui intègre également de la musique. Donc ce n'est pas tout à fait un saut dans l'inconnu pour moi

Après votre ouvrage, Sorties de route, (Collection Le Carré, La Machine à Cailloux) Bertrand Belin écrivain hors du champ musical c'est possible ?
C'était une commande, pour une collection se focalisant sur les chanteurs. Je suis occupé à écrire un livre, mais c'est avant tout l'acte d'écrire avant sa forme ou sa destination qui me plaît. J'accumule. Sans doute quelque chose qui veut devenir quelque chose mais pour l'instant je laisse cela aux autres.