Chaque année, Cannes n'échappe pas à un film au parfum de scandale. Lars Von Trier mis hors jeu, la première manifestation du malaise est venue de l'autrichien Ulrich Seidl, réputé subversif. En 2006, il avait traité frontalement de la misère sexuelle en Europe de l'Est avec Import/Export. Un sujet qui n'est pas vraiment laissé de côté dans Paradis Amour, que l'on dit premier volet d'une trilogie. Elle suivra trois membres d'une même famille, qui ravalent leur mal-être, à la recherche d'une échappatoire.

C'est à la mère d'ouvrir les présentations dans ce film qui parle d'amour, amour contraint et misérable. Elle approche la soixantaine et profite de l'absence de sa fille pour partir pour un safari en Afrique avec quelques copines qui viennent y retrouver un désir perdu. Des « sugar mamas » qui cherchent à recevoir des faveurs sexuelles contre monnaie sonnante et trébuchante et oublient ainsi leur détresse en dominant la misère locale. Le film a le mérite de poser la réflexion en collant le drame au nez du spectateur. Cette femme, qui refuse d'abord de se laisser prendre à ce manège, va finir par s'y jeter pleinement, furieuse d'y laisser son argent mais revenant toujours à la charge. C'était sans compter sur la caméra qui se vautre lourdement et avec complaisance dans un voyeurisme malsain. Chronique marquée par un racisme qui pose la réflexion (tous les clichés du bon sauvage y passent) ; elle est illustrée d'une mise en scène froide et abjecte où des groupes d'africains se pressent en ligne devant ces femmes qui les jaugent de haut en bas, jusqu'à une pénible partie fine étirée sur la longueur et qui porte pendant de longues minutes la misère sexuelle au summum du sordide. Fallait-il en arriver là pour lancer le débat ?